The Leftovers saison 1 : Ceux qui restent

Posté le 15 septembre 2014 par

Retour sur la saison 1 de The Leftovers qui s’est achevée dimanche dernier sur HBO.

Il m’a fallu une semaine pour le digérer ce Finale. Je ne voulais pas écrire un article à chaud, pour ne pas me laisser submerger par l’émotion. Pourtant, en commençant cet article, je me rends compte que The Leftovers est restée avec moi, en moi, depuis la fin de la diffusion. Dans ma tête, dans mon coeur, les notes de piano de Max Richter résonnent encore, les airs cycliques tournent, tournent encore, les regards et les cris sourds de désespoir ne cessent de m’envahir.

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Regarder la première saison de The Leftovers est une expérience éprouvante et exigeante. Une sorte de longue agonie en 10 épisodes, un tunnel de souffrance et de peine, pendant lequel on se pose 1000 questions. On partage les interrogations des personnages, tout en ressentant leur souffrance, physiquement. La résolution du mystère – 2% de la population qui disparaît en un instant- n’est pas vraiment ce qui intéresse Damon Lindelof, le showrunner. Comme dans Lost, ce qui importe, ce sont les personnages et leur évolution. Mais contrairement à cette dernière, ses intentions sont claires dès le début, et il peut exprimer avec plus de facilités et de force ses idées, même les plus cruelles.

Ceux qui restent après cette catastrophe doivent lutter contre leurs démons, leur sentiment de culpabilité, leur peine incommensurable. Ils évoluent tous sans but ou presque, entre apathie et explosion de douleur. La petite ville de Mapleton, lieu de l’action, a exactement la même fonction que l’ile des disparus du vol oceanic 815 : purgatoire et enfer à la fois, prison à ciel ouvert. Il semble impossible d’en sortir, autant pour les protagonistes que pour nous. Les chiens errent par centaines, une secte aux intentions floues rôde : il y a quelque chose de mystique dans The Leftovers, surréaliste, l’impression que la série peut sans cesse basculer. Elle évolue continuellement sur le fil, entre réalisme et fantastique.

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Celui qui reste, c’est aussi Damon Lindelof. Un showrunner meurtri après la fin de Lost qui a divisé le monde entier. Il est possible de voir en The Leftovers le prolongement des thèmes de Lost, mais inversé. Les obsessions d’un auteur pour la foi, la perte, l’absence du père sont présentes, elles tournent en boucle, comme la musique de Max Richter. Lost était l’histoire d’une rédemption, The Leftovers semble plutôt montrer que dans ce monde, elle n’est pas vraiment possible. Un constat pessimiste pour un showrunner qu’on sent amer. Il semble avoir perdu la lumière, un peu comme Kevin Garvey (Justin Theroux) personnage principal, shérif de la ville. Garvey est le garant de l’ordre, il court partout, tente d’aider et conseiller les habitants de la ville, alors qu’il est lui-même au bord du gouffre. Il tient la baraque, mais les murs se fissurent. Il est tentant de déceler quelque chose de Lindelof dans ce personnage, un showrunner encore en colère, aigri, mais qui pourtant se lève tous les matins.

Ceux qui restent luttent pour continuer de se lever tous les jours, pour trouver une raison de vivre. The Leftovers parle avant tout de la dépression, de ce qui ronge, et de l’incapacité à se l’expliquer. Rarement dans une série, on aura ressenti avec tant de force des sentiments aussi contradictoires, des émotions qui arrivent par torrent, sans vraiment crier gare. On reste juste hagard avec les protagonistes, on cherche des signes qu’on veut croire véritables, l’espoir de lendemains meilleurs. On y trouve le chaos, la rage. On veut oublier ce qui nous détruit, nous consume à petit feu, mais chaque objet, chaque personne restante sont autant de rappels douloureux. Les personnages sont toujours sur le point de craquer, de fondre en larme ou de partir dans des accès de rage, ils sont tous une facette de la dépression, de cette mélancolie qui les empêche d’avancer.

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Ceux qui restent, maintenant, c’est nous. The Leftovers laisse une marque indélébile. On a ses notes de musique dans la tête, on a entendu ce cri de douleur. On veut la suite autant qu’on la redoute. Ce doute, on le partage avec le showrunner qui comme dans Lost s’interroge sans cesse, expriment ses incertitudes et ses regrets. On a regardé ce qu’il y avait dans le coeur de Damon Lindelof et ce qu’on a vu était merveilleux.

Jérémy Coifman.

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