Profiler- Episode 3 : Walter White et Jesse Pinkman (Breaking Bad)

Posté le 21 juillet 2014 par

Cette semaine, portrait de deux personnages inoubliables : Walter White et Jesse Pinkman de Breaking Bad.

Walter White : Docteur White et Mister Heisenberg

Walter White (Bryan Cranston), professeur de chimie dans un lycée du Nouveau-Mexique, représente l’Amérique du « milieu », un homme de famille banal enfermé dans une existence qui ne lui sied guère. Il traine son mal-être jusque dans sa façon de se tenir, de s’habiller ou de se coiffer. Il est un peu moqué par ses élèves, croule sous les dettes et doit même travailler dans une station de lavage auto pour pouvoir joindre les deux bouts. Walter encaisse, sans sourciller. Malgré les épreuves, il a toujours un sourire de réconfort pour son fils handicapé, toujours prêt à rendre service à sa femme enceinte. Au premier abord, impossible de détester Walter White, il personnifie la gentillesse et l’altruisme, représente l’éternel loser que l’on veut soutenir et réconforter.

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Très vite on apprend qu’il fut par le passé un brillant chimiste et qu’il n’a pas sa place dans un lycée de seconde zone. Walter White, arnaqué par ses anciens associés, Elliott et Gretchen Schwartz, qui se sont enrichis grâce à ses recherches, regarde de loin la réussite insolente et les millions de dollars, sans chercher un instant à comprendre ou à récupérer ce qui lui revient de droit. Grey Matter, la compagnie qu’il a fondé avec les Schwartz ne lui appartient plus, il n’est qu’un anonyme parmi d’autres, pendant que d’autres vivent ses rêves.

L’argent et la reconnaissance lui font défaut, deux facteurs déterminants, qui vont le pousser bien loin de sa petite vie sans histoire. Un évènement suffit à faire basculer la vie d’un homme, lui faire franchir des points de non-retour.  Un mot, brutal, le cancer. Il doit trouver de l’argent rapidement, pour son traitement d’abord, mais surtout pour assurer un futur à sa famille. Le professeur décide dans un instant de folie, de se lancer dans la fabrication de méthamphétamine et choisit Jesse Pinkman ( Aaron Paul) pour l’assister. Sa quête d’argent vire rapidement à la quête de pouvoir. La morne vie de Walter White prend un tournant enivrant et tragique à la fois. Son cancer a réveillé le monstre tapi dans l’ombre. Heisenberg, son alter-ego, sort peu à peu de sa boite. White se réinvente totalement. Crâne rasé, chapeau, lunette et vêtements noirs, la légende nait sous nos yeux. Il devient une entité presque fantomatique qui rôde dans tout l’état. Une ascension fulgurante, de l’argent à foison, une incarnation de la peur, tout ce dont Jesse rêvait aussi. On écrit des chansons sur Heisenberg, on le vénère autant qu’on le craint.

Impossible de faire demi-tour, Walter White ne refera surface qu’à quelques occasions, Heisenberg a pris le dessus de façon irréversible. La haine et la violence finissent par modeler cet homme d’apparence doux et calme. Sa vraie nature peut enfin s’exprimer. Sous ses airs de patriarche protecteur d’une cellule familiale en déréliction, tout ce qu’il entreprend n’est là que pour étancher sa soif insatiable de pouvoir. Une figure effrayante, un anti-héros légendaire.

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Jesse Pinkman : Le loup et l’agneau

Jesse Pinkman est ce qu’on appelle communément une « petite frappe ». Elève doué mais indiscipliné, il préfère quitter les bancs de l’école et tenter sa chance dans la rue. Son arrogance, sa façon de s’adresser aux gens en font un personnage tout de suite détestable, virant rapidement à la caricature. Il ne fait pas grand-chose de la journée, il fume et joue aux jeux vidéo, vit de petits trafics avec ses amis. Il ne cherche pas d’emploi. Jesse se donne des allures de gangster, mais reste un éternel adolescent biberonné aux sagas mafieuses. Ses « Yo » et « Bitch », prononcés à chaque fin de phrases sont ridicules. Il tombe dans une spirale un peu par hasard, en rencontrant son ancien professeur de chimie, Walter White. Il voit cette association comme la chance de sa vie. Tragiquement, ce sont les personnages eux-mêmes qui scellent leur destin.

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C’est en découvrant l’envers du décor que s’opère une prise de conscience chez le jeune homme. Le sang versé et les vies sacrifiées, lui font comprendre qu’il n’est pas fait pour vivre dans ce milieu. Jesse n’a pas l’estomac pour être un gangster. Nous découvrons en même temps que lui sa véritable nature. Il devient un personnage lumineux. Le gentil de l’histoire, c’est lui. Celui qui sauve les enfants, qui garde un sens moral. Il ne triche pas. Aussi fragile qu’Heisenberg est sans pitié, il ne parvient pas à remonter à la surface, maintenu sous l’eau par son mentor, père spirituel monstrueux, araignée qui coince sa proie pour mieux la dévorer.

Sous les ordres permanents de Walter, il se donne l’illusion du contrôle en menant ses amis dealers notoires et incompétents dans des opérations inutiles et inconsidérées. Il est incapable de diriger, et dans la vie de Jesse, il n’y a rien qui puisse le sauver. Tout ce qui pourrait le faire sortir de sa spirale infernale est supprimé par Walter ou par le destin. Le jeune homme coule. Quand ses larmes ruissèlent, que sa douleur s’exprime, on souffre avec lui. Il vit durant l’intégralité de la série un douloureux chemin de croix. S’en sortir devient pour lui accessoire tant le peu d’espoir qu’il a en lui s’évapore. L’euphorie initiale laisse place à l’apathie.

Jérémy Coifman. 

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